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Conçu avec comme objectif de venir en aide de manière concrète au peuple palestinien, le blog se verra ajouter des liens vers des associations humanitaires qui oeuvrent en faveur du peuple palestinien et spécialement de l'enfance palestinienne et de l'éducation et de la culture. J'espère que vous prendrez plaisir à lire les poèmes et que vous en profiterez pour découvrir les nombreux projets menés. Je recherche des poèmes écrits en français en relation avec la Palestine.

lundi 7 novembre 2016

Rétropective Fadwa Toukan

Née avec la déclaration Balfour, Fadwa Touqan est l'une des rares voix féminines de la poésie palestinienne; ses premiers écrits sont des élégies funèbres, où elle conjugue au féminin les thèmes chers au romantisme: la nature, l'amour, la solitude, la tristesse, le désarroi, dans un style raffiné, délicat et plein de sensibilité. Après la défaite de 1967, sa poésie s'oriente vers des thèmes nationalistes. La parution de son autobiographie, Le Rocher et la peine, a été saluée comme un événement littéraire. Bien qu'ayant grandi dans un environnement propice à l'épanouissement artistique (c'est son frère, le poète Ibrahim Touqan, qui lui fait découvrir la poésie),Fadwa Touqan a souffert du milieu familial ultra-traditionnel: enfant non désirée, interdite d'école, père despotique, mère soumise... L'auteur démonte sans concession le mécanisme de ce système, au mépris des tabous et des interdits sociaux, et diagnostique lucidement son mal-être. Son itinéraire est fait de souffrance et de vertige. «Mon histoire, c'est l'histoire de la lutte d'une graine aux prises avec la terre rocailleuse et dure. C'est l'histoire d'un combat contre la sécheresse et la roche», dit-elle en conclusion. Elle précise que son temps «était celui de l'asservissement» et son espace «celui de la prison domestique». 


Fadwa Touqan a étudié l’anglais et la littérature anglaise à l’Université d’Oxford de 1962 à 1964 puis a voyagé en Europe. Touqan est considerée comme une des premières poétesses palestiniennes et a reçu de nombreux prix litteraires tels que le Prix International de Poésie à Palerme (Italie), le Prix Jérusalem pour la Culture et le Prix des Lettres par l’OLP en 1990, le Prix des Emirats Arabes Unis la même année ainsi que le Prix d’Honneur Palestinien pour la Poésie en 1996. Ses écrits incluent ses souvenirs d’enfance dans « Mountainous Journey » (1985), les poèmes « Self-Portrait » et « Martyrs of the Intifada » ainsi que les recueils « Donne-nous de l’amour » (en arabe, 1960), « Avant que la porte ne se ferme » (en arabe, 1967) et « Daily Nightmare » (traduit en anglais, 1988). Elle fut le sujet d’un documentaire filmé dirigé par la romancière Liana Badr en 1999 avant de mourir à Naplouse le 12 décembre 2003 suite à une attaque cérébrale. Son autobiographie en deux volumes a été traduite en français sous les titres : « Le Rocher et la peine » et « Le Cri de la Pierre ».


Le Rocher et la peine (Mémoires I), Paris, Langues et Mondes / L’Asiathèque, 1997 (ISBN 2-911053-30-3)


Le Cri de la pierre (Mémoires II), Paris, Langues et Mondes / L’Asiathèque, 1998 (ISBN 2-911053-31-1)








Fadwa Touqan était la sœur de ‘Ibrahim Touqan, poète, dramaturge et directeur de Radio Palestine, décédé en 1941 et dont les poèmes étaient devenus un cri de ralliement politique pour les Palestiniens durant la Grande Révolte contre le colonisateur britannique de 1933-37. Il a introduit sa jeune sœur à la poésie à travers les lettres qu’il lui écrivait de Beyrouth, où il était professeur. Fadwa est née à Naplouse peu de temps avant la déclaration Balfour, qui promettait une patrie aux Juifs d’Europe. Elle a reçu une éducation privilégiée, mais strictement comprimée dans les normes sociales de l’époque. Lorsqu’en 1948 des centaines de Palestiniens expulsés affluèrent à Naplouse, la ville endosse le rôle de pôle culturel des cités perdues de Jaffa, Haïfa et de Jérusalem Ouest. Paradoxalement cette catastrophe palestinienne, la « Nakba » et le décès, en 1948 également, de son père si sévère ont coïncidé pour elle à un sentiment de libération. Le système féodal s’écroule, soudain des jeunes femmes éduquées pouvaient librement côtoyer leurs jeunes partenaires masculins. « Lorsque le toit s’est effondré sur la Palestine, le voile qui cachait le visage des femmes de Naplouse est tombé » écrit-elle.


Inspirée par cet esprit dynamique, Fadwa Touqan poursuit ses publications débutées avec « Mon Frère Ibrahim » en 1946 et publie « Seule avec les Jours » en 1952, « Donne nous ton Amour » (1960) et « Devant la Porte Fermée » (1967). Ces poèmes retracent l’évolution de la conscience politique palestinienne : depuis la commotion, le désespoir et le sentiment d’être victimes d’une profonde injustice, à l’éveil de « summud » (la ténacité) la résistance et une nouvelle fierté.


Israël n’était cependant pas son seul adversaire. Elle ciblait aussi la société arabe elle-même, et en particulier le traitement des femmes. Dans son autobiographie (traduite en anglais sous le titre « Un Voyage Escarpé » 1990) elle décrit comment les femmes arabes demeurent cachées dans leur foyer comme des oiseaux effrayés dans une cage bondée.


Ses années d’étudiante à Oxford de 1962 à 64, où elle poursuit des études de langue et de littérature anglaise, représentent une échappée bienvenue loin des peines de l’Orient. Elle savoure la campagne anglaise, et décrit avec affection Londres, la « métropole âgée » où n’importe qui peut devenir anonyme – du moins pour un moment. Fadwa a beaucoup voyagé en Europe et au Proche Orient, empruntant des motifs de sa vie en exil et les mêlant avec des expressions audacieuses d’une volupté sans entraves.


Même lorsque ses poèmes sont inspirés de thèmes explicitement « non palestiniens » – comme par exemple « Visions of Henry » inspirées d’un tableau de Faulkner – ils évoquent immanquablement sa « patrie perdue « , ils traduisent le contraste entre l’échappée du présent et le « rocher noir » de la mémoire.


La poésie de Fadwa Touqan devient plus directement nationaliste après l’occupation et l’installation du pouvoir militaire israélien à Naplouse en 1967. L’occupation fournit une nouvelle actualité, le cauchemar des attentes aux passages des barrages militaires, l’ignominie des démolitions de maisons, et l’engagement pour l’éducation des jeunes enfants. Et ses poèmes expriment aussi jusqu’à ce jour l’absence de toute reconnaissance de liens de l’ennemi avec cette terre. La traduction de ses poèmes en anglais dans les années 1980 lui confère une renommée internationale. Des jeunes Arabes de nationalité américaine redécouvrent leurs racines en lisant son œuvre, des femmes juives israéliennes trouvent une résonance solidaire dans la voix de leur « sœur » à travers la « ligne verte ». Elle resta célibataire et n’a pas eu d’enfants.


De nombreux prix littéraires ont été décernés à Fadwa Touqan, d’Italie, de Grèce et de Jordanie ; elle a reçu le prix pour l’Art et la Culture de Jérusalem (Jérusalem Award) en 1990, elle a été membre du conseil d’administration de l’Université an-Najjah à Naplouse. Beaucoup d’Israéliens considéraient cependant ses analyses politiques comme regrettablement biaisées, et certains Palestiniens estimaient que ses critiques de la société arabe ne faisaient que reproduire les préjugés « orientalistes » des occidentaux.





En fin de compte Touqan restera dans les mémoires pour la puissance de son expression poétique. Salma Jayyusi disait d’elle qu’elle possédait « la maitrise de deux talents : l’amour et la peine ». Une femme qui a su préserver la mémoire de son peuple et exprimer ses aspirations.

Née à Naplouse et morte le 12 décembre 2003 à Naplouse, son voeu sera exhaussé.

« Je ne demande rien de plus
Que de mourir sur ma terre
De me fondre et m’unir à l’herbe
De donner vie à une fleur
Qu’un enfant de mon pays cueillera
Je ne demande qu’une chose
Rester dans le sein de ma terre
Dans le sol et l’herbe, comme une fleur… »

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